Les SDF, les jeunes, les musiciens et les désœuvrés qui squattent les bancs publics sont le prétexte à leur déboulonnement. Sans eux, pourtant, les urbains se cloîtrent et la cité risque de mourir.
A Angoulême (Charente), on a voulu les grillager ; à Perpignan (Pyrénées-Orientales), on veut les escamoter. Régulièrement, depuis plusieurs décennies, certains élus veulent la peau du banc public. Pour le réduire en allumettes, ils l’accusent du pire des maux de la cité : la nuisance. Squatté par les SDF, les jeunes, les musiciens, les chômeurs, les désœuvrés, voilà les riverains exaspérés, les commerçants à cran, les habitants inquiets. En bon bouc émissaire, c’est le banc qui trinque. « Le banc disparaît là où il y de la démagogie de la part des élus et de l’incapacité politique à gérer les conflits », explique Jean-Paul Blais, sociologue et urbaniste, enseignant à l’Ecole des ingénieurs de la ville de Paris.
Une petite pétition et ciao ! Pire, la tentation est grande pour ceux qui ne veulent pas voir s’afficher la pauvreté ou l’oisiveté de prévoir et d’organiser l’éclipse du siège. Résultat, on se plaint, à Marseille, de l’absence de bancs dans le réaménagement du quai des Belges, au Vieux-Port. Fini le repos face à la Bonne Mère, gémit un blogueur de la cité phocéenne. Pas de bancs sur la Grand-Place de Lille pour souffler un peu, pleure une internaute ch’ti sur le site de la Voix du Nord. Les exemples foisonnent qui le réclament aux aménageurs. Car paradoxalement, le banc est un objet dont les citadins ne peuvent pas se passer.